Nous avons tous des préjugés. Non seulement ça, mais en plus, nous sommes au courant d’encore plus de préjugés. Par exemple, certains ont sûrement déjà entendu que les Noirs ont le rythme (la musique) dans le sang. Ou que les Noirs ont des gros pénis… Mais ça c’est vrai. Selon mes vidéos.
L’activation automatique d’un préjugé, c’est quand on active/porte à la conscience de la personne un préjugé. Cet activation du préjugé dans l’esprit de la personne affecte le comportement de celle-ci, qu’elle adhère au préjugé ou pas! (N.B. : je dis « porte à la conscience », mais ce n’est pas nécessaire; nous pouvons être influencés par des préjugés activés sous le seuil de la conscience, par exemple si on flash le mot « Noir » pendant 100 millisecondes).
Ceci a plusieurs implications importantes. Par exemple, un professeur de mathématiques peut dire juste avant un examen : « là les filles, je sais que c’est un examen de maths mais forcez-vous quand même ». Ceci aurait pour effet (preuves expérimentales à l’appui) une sous-performance des filles à cet examen, qu’elles pensent que les filles sont moins bonnes en maths que les gars ou pas. C’est ce qui est fascinant avec la chose… ou dramatique. Je ne sais quel mot choisir, depuis que j’ai parlé des pénis de Noirs j’ai la tête ailleurs.
Je vais donc vous parler d’un préjugé plus en particulier. Celui que les hommes seraient meilleurs que les femmes aux échecs. En fait, les statistiques sont les suivantes : seulement 5% des joueurs de tournois sont des femmes (les 95% qui restent ben… ce sont des hommes), et seulement 1% des meilleurs joueurs au monde sont des femmes (et non pas 5%). Il y a donc sous-représentation et sous-performance effective des femmes dans le monde échiquéen.
Mais à quoi est-ce dû? Les femmes sont-elles de fait moins bonnes par nature que les hommes aux échecs?
Une étude tend à démontrer que l’explication serait plus compliquée que ça. Il s’agirait plutôt de la distinction entre compétence et performance. Les hommes et les femmes auraient possiblement une même compétence innée pour les échecs, mais les femmes performeraient moins bien que les hommes lorsque confrontées à la situation compétitive de la partie. Pourquoi?
Les chercheurs ont fait une expérience. Ils ont pairé deux joueurs de sexe différent (i.e., un homme et une femme) et de même calibre tel qu’évalué par la cote de classement, et ces 2 personnes ont joué 2 parties un contre l’autre. Toutefois, les parties se jouaient sur Internet : les 2 personnes avaient des surnoms neutres, de telle sorte qu’aucun des joueurs ne savait si son adversaire était un homme ou une femme. C’étaient les chercheurs qui informaient les participants du sexe de leur adversaire.
Lorsque les chercheurs ne disaient pas aux participants quelque chose comme « des études récentes démontrent que les hommes sont meilleurs aux échecs que les femmes » (pas d’activation du préjugé), les résultats aux parties étaient équivalents, que le joueur soit un homme ou une femme, et peu importe le sexe de l’adversaire. En moyenne, ils gagnaient tous 1 partie sur 2 (ce qui est normal, était donné que les joueurs pairés avaient la même cote de classement). C’est-à-dire que la performance était la même tant chez les hommes que chez les femmes.
MAIS!, quand les chercheurs disaient aux participants que « des études récentes démontrent que les hommes sont meilleurs aux échecs que les femmes » (activation du préjugé), les performances des femmes étaient inférieures à celles des hommes. Lorsque les femmes pensaient qu’elles jouaient contre une femme après qu’on eût activé chez elles le préjugé, leur performance était normale (gagnaient 1 partie sur 2). Mais si on activait chez elles le préjugé, et qu’elles croyaient jouer contre un homme, elles ne scoraient plus que 0,5/2 (au lieu de 1 / 2), c’est-à-dire qu’elles perdaient en moyenne une partie et annulaient l’autre, sans jamais gagner.
Les hommes, quant à eux, que le préjugé soit activé ou pas, et qu’ils croyaient jouer contre un homme ou une femme, leur performance ne changeait pas : toujours en moyenne 1 victoire sur 2 parties.
Il y a d’autres données qui corroborent l’hypothèse de l’influence du préjugé pour expliquer la sous-performance (versus sous-compétence) des femmes aux échecs. Par exemple, lorsque les participants passent un examen pour tester leurs connaissances échiquéennes, les hommes scorent aussi bien que le laissent croire leurs résultats aux parties, alors que les femmes scorent mieux dans ce test individuel que dans leurs parties contre des hommes.
De la même façon, les chercheurs ont contrôlé pour les différences cognitives existant entre les hommes et les femmes (par exemple, les hommes sont généralement meilleurs que les femmes pour les tâches spatiales et de rotation mentale). Dans l’étude, ces différences ne pouvaient pas expliquer les différences de performance!
Est-ce que le phénomène d’activation des préjugés expliquerait donc les différences de performance qui existent entre les hommes et les femmes aux échecs? Peut-être pas entièrement; ledit phénomène semble néanmoins occuper un rôle central dans l’explication. C’est un argument en faveur de catégories unisexes aux tournois. Ceux-ci amènent la controverse, et même certaines femmes (!) ne sont pas d’accord avec cette catégorisation unisexe aux tournois, puisque c’est comme admettre que les femmes sont moins bonnes et bla bla bla… que voulez-vous, on ne lit pas tous des articles de psychologie.
(P.S. : pour ceux que ça intéresse, le compte-rendu exhaustif de l’expérience est disponible sur mon blog en anglais, sous l’article Psychology : are men better at chess than women?)
L’activation automatique d’un préjugé, c’est quand on active/porte à la conscience de la personne un préjugé. Cet activation du préjugé dans l’esprit de la personne affecte le comportement de celle-ci, qu’elle adhère au préjugé ou pas! (N.B. : je dis « porte à la conscience », mais ce n’est pas nécessaire; nous pouvons être influencés par des préjugés activés sous le seuil de la conscience, par exemple si on flash le mot « Noir » pendant 100 millisecondes).
Ceci a plusieurs implications importantes. Par exemple, un professeur de mathématiques peut dire juste avant un examen : « là les filles, je sais que c’est un examen de maths mais forcez-vous quand même ». Ceci aurait pour effet (preuves expérimentales à l’appui) une sous-performance des filles à cet examen, qu’elles pensent que les filles sont moins bonnes en maths que les gars ou pas. C’est ce qui est fascinant avec la chose… ou dramatique. Je ne sais quel mot choisir, depuis que j’ai parlé des pénis de Noirs j’ai la tête ailleurs.
Je vais donc vous parler d’un préjugé plus en particulier. Celui que les hommes seraient meilleurs que les femmes aux échecs. En fait, les statistiques sont les suivantes : seulement 5% des joueurs de tournois sont des femmes (les 95% qui restent ben… ce sont des hommes), et seulement 1% des meilleurs joueurs au monde sont des femmes (et non pas 5%). Il y a donc sous-représentation et sous-performance effective des femmes dans le monde échiquéen.
Mais à quoi est-ce dû? Les femmes sont-elles de fait moins bonnes par nature que les hommes aux échecs?
Une étude tend à démontrer que l’explication serait plus compliquée que ça. Il s’agirait plutôt de la distinction entre compétence et performance. Les hommes et les femmes auraient possiblement une même compétence innée pour les échecs, mais les femmes performeraient moins bien que les hommes lorsque confrontées à la situation compétitive de la partie. Pourquoi?
Les chercheurs ont fait une expérience. Ils ont pairé deux joueurs de sexe différent (i.e., un homme et une femme) et de même calibre tel qu’évalué par la cote de classement, et ces 2 personnes ont joué 2 parties un contre l’autre. Toutefois, les parties se jouaient sur Internet : les 2 personnes avaient des surnoms neutres, de telle sorte qu’aucun des joueurs ne savait si son adversaire était un homme ou une femme. C’étaient les chercheurs qui informaient les participants du sexe de leur adversaire.
Lorsque les chercheurs ne disaient pas aux participants quelque chose comme « des études récentes démontrent que les hommes sont meilleurs aux échecs que les femmes » (pas d’activation du préjugé), les résultats aux parties étaient équivalents, que le joueur soit un homme ou une femme, et peu importe le sexe de l’adversaire. En moyenne, ils gagnaient tous 1 partie sur 2 (ce qui est normal, était donné que les joueurs pairés avaient la même cote de classement). C’est-à-dire que la performance était la même tant chez les hommes que chez les femmes.
MAIS!, quand les chercheurs disaient aux participants que « des études récentes démontrent que les hommes sont meilleurs aux échecs que les femmes » (activation du préjugé), les performances des femmes étaient inférieures à celles des hommes. Lorsque les femmes pensaient qu’elles jouaient contre une femme après qu’on eût activé chez elles le préjugé, leur performance était normale (gagnaient 1 partie sur 2). Mais si on activait chez elles le préjugé, et qu’elles croyaient jouer contre un homme, elles ne scoraient plus que 0,5/2 (au lieu de 1 / 2), c’est-à-dire qu’elles perdaient en moyenne une partie et annulaient l’autre, sans jamais gagner.
Les hommes, quant à eux, que le préjugé soit activé ou pas, et qu’ils croyaient jouer contre un homme ou une femme, leur performance ne changeait pas : toujours en moyenne 1 victoire sur 2 parties.
Il y a d’autres données qui corroborent l’hypothèse de l’influence du préjugé pour expliquer la sous-performance (versus sous-compétence) des femmes aux échecs. Par exemple, lorsque les participants passent un examen pour tester leurs connaissances échiquéennes, les hommes scorent aussi bien que le laissent croire leurs résultats aux parties, alors que les femmes scorent mieux dans ce test individuel que dans leurs parties contre des hommes.
De la même façon, les chercheurs ont contrôlé pour les différences cognitives existant entre les hommes et les femmes (par exemple, les hommes sont généralement meilleurs que les femmes pour les tâches spatiales et de rotation mentale). Dans l’étude, ces différences ne pouvaient pas expliquer les différences de performance!
Est-ce que le phénomène d’activation des préjugés expliquerait donc les différences de performance qui existent entre les hommes et les femmes aux échecs? Peut-être pas entièrement; ledit phénomène semble néanmoins occuper un rôle central dans l’explication. C’est un argument en faveur de catégories unisexes aux tournois. Ceux-ci amènent la controverse, et même certaines femmes (!) ne sont pas d’accord avec cette catégorisation unisexe aux tournois, puisque c’est comme admettre que les femmes sont moins bonnes et bla bla bla… que voulez-vous, on ne lit pas tous des articles de psychologie.
(P.S. : pour ceux que ça intéresse, le compte-rendu exhaustif de l’expérience est disponible sur mon blog en anglais, sous l’article Psychology : are men better at chess than women?)
(P.P.S.: titre choc, je sais.)
2 commentaires:
J'ai déjà donné un article (wikipedia.org/wiki/Stereotype_threat) traitant de la chose ("stereotype threat") sur wikipédoche... !
Je pense que, comme le droit de vote et le droit de parler, le droit de jouer aux échecs devrait être exclusif aux hommes.
LOL, de parler..
que trop vrai
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